jeudi 4 juillet 2013

Coup d'état bizarrement démocratique





L’Egypte vient de vivre un événement incroyable. En effet, on a assisté à un véritable coup d’état militaro-démocratique.

Mohammed Morsi, président élu a été évincé par l’armée égyptienne, ce qui semble réjouir les médias occidentaux, car le président déchu est un méchant membre des Frères musulmans pour ces derniers. Il ne s’agit pas ici d’être un farouche défenseur des Frères musulmans, car les griefs à l’encontre du président déchu existent. Rappelons que Mohammed Morsi n’a pas mis fin au blocus de Gaza, ni même essayé de l’atténuer quelque peu, il a rompu les relations diplomatiques avec la Syrie de Bachar-al-Assad, il a rencontré à plusieurs reprises des dirigeants américains, et les as assuré de sa collaboration. Bref ce dernier a multiplié les signes de bonne volonté envers l’Occident. On lui reproche d’avoir adopté une constitution taillée sur mesure, mais elle fut adoptée par référendum. Il est arrivé au pouvoir par la voie légale, ce que personne ne conteste. Il aurait déçu les espoirs de ceux qui ont voté pour lui. Les pyramides ne se sont pas construites en un an à ce que je sache ! Et les gouvernements français UMPS qui se succèdent depuis quarante ans maintenant sont-ils priés de déguerpir une fois leur état de grâce évaporé ?

Les partisans du président déchu sont quant à eux sommés de se traire. On ne les interroge pas, on leur demande pas leur avis, on ne doit pas savoir ce qu'ils pensent de tout cela. Les télévisions affiliés aux Frères musulmans, sont fermées, leurs animateurs arrêtés. La voilà donc la liberté d'expression et d'opinion chère à l'Occident. Oui il s'agit bel et bien de la mise en application du principe des droits de l'homme non barbu. Personne aussi ne doit s'interroger sur la spontanéité de ces événements.

Le scénario que vit l’Egypte ressemble à s’y méprendre à celui qu’à connu l’Algérie en janvier 1992 après l’annulation de la victoire du Front Islamique du Salut aux élections et le putsch des généraux. Les militaires égyptiens peuvent ainsi s’appuyer sur la jurisprudence Khaled Nezzar, du nom du général algérien qui dirigea le putsch en janvier 1992. C’est bizarre de voir ces démocrates dans les médias en Egypte et en Occident, pacifiques en appeler à l’armée pour renverser un pouvoir civil légal.  Ainsi, hier sur I-Télé, nous avons l’écrivain Adel Rifaat ; né Eddy Levy frère du philosophe Benny Levy ça ne s’invente pas et converti à l’Islam il paraît ; trouve pour sa part que c’est génial que c’est la preuve de l’esprit démocratique, que les égyptiens réinventent la démocratie à leur manière, qu’ils font rugir le sphinx démocratique qui est en eux, ou que sais-je encore. Peut-on penser qu’en France l’armée ait pu songer à renverser le président Nicolas Sarkozy après que ce dernier ait adopté le traité de Lisbonne en 2007, copie conforme de la constitution européenne que les français avaient rejeté par voie référendaire en 2005 ? Ou bien même la grande muette penserait-elle à renverser le président François Hollande après la dure répression de la manif pour tous ? Impensable ! Le manifestant Nicolas, membre du collectif « La Manif pour tous » emprisonné, c’est moins crédible pour diaboliser François Hollande que la pauvre Sakineh pour diaboliser Mahmoud Ahmadinejad.

Sur la chaîne I-télé toujours, le journaliste Olivier Ravanello ose la comparaison avec le coup d’Etat du 18 Brumaire de Bonaparte, en arguant du fait que les chefs militaires égyptiens sont très au fait de la Révolution française, et inspirés par l’homme de Saint-Hélène. Ce serait donc un hommage rendu au locataire du musée des Invalides plus de 200 ans après la bataille des Pyramides. Méhémet-Ali a offert au roi Louis-Philippe Ier l’Obélisque qui orne la Place de la guillotine, ca devrait suffire non ? Toujours cette manie très française de voir dans la « Révolution française » la pierre d’achoppement de toute l’histoire de l’humanité, cet ethnocentrisme indécrottable. L’Egypte, l’une des plus vielles civilisations du monde ne vit pas au rythme de l’intellect des salons parisianistes, sachez-le.

Les Frères Musulmans paient ainsi le prix de leur manque de vigueur, d’esprit d’indépendance. Leur marge de manœuvre était certes extrêmement réduite. Mais qu’un président oint par le sacre démocratique, présent par la volonté du peuple et sorti par la puissance des baïonnettes ; tiens ca me rappelle quelque chose ; ne semble absolument pas déranger les médias occidentaux. Dans ce cas-là il faut vouer aux gémonies le général de Gaulle arrivé en 1958 par voie illégale, mettant ainsi fin au régime civil de la IVème République. Pis encore, il faut en outre réhabiliter le général Pinochet qui a renversé dans le sang le régime du président Salvador Allende au Chili un certain 11 septembre 1973.


En tout cas, tout ceci n’augure rien de bon, pour l’avenir de l’Egypte, pays arabe le plus peuplé qui doit être neutralisé à tout prix pour faire les affaires d’un certain voisin et de l’Oncle Sam.




Anis Al Fayda

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